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Lecture par Jacques Lagrois
Petit soldat
S’est armé de courage
Dès l’ennemi dénoncé.
En montant vers le front
Il n’était pas seul,
Une épaule bienveillante
Renforçait sa cuirasse.
Confiant d’être plus fort,
Il a bravé ses peurs
De l’aiguisée baïonnette.
Aux premiers assauts,
Lui cisaillant le poitrail,
Par deux fois
Il a serré les dents,
Fier de tenir toujours
Fanfaronnant debout.
L’unisson des tambours
Résonnait encore
Dans l’écho de son âme.
Sur l’autre rive
En doux espoir,
La victoire était au pied
D’un merveilleux rainbow.
Petit soldat
Poursuivait la lutte.
À chaque salve perfide,
Il devenait plus sourd
Aux moindres signes
De toute tendresse sacrée.
Noyant aigri son sang
Dans les rivières du mal,
Il oubliait la lumière,
Et s’aveuglait de haine
Contre le monde entier.
En ordre desserré,
Le bataillon vacillait,
Les arches du ciel se délavaient,
L’horizon lui échappait.
Loin des bruits sucrés de toute vie,
Ici, c’était la guerre
Fragmentant chaque jour
La moindre acre de terre
De sombres tranchées
Pernicieuses, plus meurtrières
Que le métal de ses cris
Canonnés aux silences
De sa précieuse patrie.
Petit soldat !
Vous guerroyiez ?
Alors, pleurez maintenant !
Accablant de mépris
Jetant aux crocs des chiens
Tout compagnon d’armes,
Jusqu’au plus fidèle
D’entre les fidèles,
Adieu magique rainbow ?
Vous faudra-il batailler
Dorénavant fragile,
Le cœur roulant dans la boue
Loin du chant du tambour ?
Petit soldat,
En vous trompant de combat,
C’est votre vilenie, non cette guerre,
Qui vous a mutilé,
Fracassant votre essentiel,
Épuisant sa sève vitale.
L’ennemi... C’était vous !
Petit soldat,
Ose regarder en face
Ta si belle œuvre,
Cette fois de trop ...
Aujourd’hui nu,
Sans armure,
Vois ta chemise rougie
Flotter en blanc drapeau,
Sans âme,
Sans lui,
Dans un vide béant
Qui désormais te tue.
Anna - 26 Avril 2014 ©