Crois-tu possible à nouveau de vivre pour soi-même ?

Est-il encore réversible de quitter le jardin gris d’ombres ?

Quelle ferveur peut s’éveiller de la négligence d’un temps si blême ?

Quel feu peut des limbes damnés renaître sans encombre ?

Crois-tu possible de croire à d’autres destinées ?

Que cauchemars d’antan se réveillent chrysalides ?

Quel cœur guérit impatient, pourtant perdu dans trop d’obscurité ?

Que des cendres renaîtront, consentants, de transports solides ?

Crois-tu possible de donner sans retour ?

Est-il toujours accessible ce doux présent sans charité ?

Quand croyances faciles cesseront de jouer des tours ?

Et si désarroi fossile s’effacera aux lueurs fruitées ?

Crois-tu possible d’avancer yeux ouverts ?

Et encore audible ce profond soupir sans regret ?

Toutes vérités deviennent-elles difficiles calvaires ?

Les illusions d’un jour meurent-elles fatalement dans la boue du marais ?

Crois-tu possible de sentir son cœur battre à nouveau ?

Encore sensible à l’autre, pas né de son ventre ?

Sans maudites promesses embrumant nos cerveaux ?

Les amertumes de jeunesse quittent-elles un jour leur antre ?

Crois-tu possible de dire bonne nuit à chaque heure du matin ?

Est-il encore disponible ce cœur ouvert aux charognards ?

Les mers de larmes brûleront-elles dans l’abyssal lointain ?

Que l’unique arme sera une main tendue dans le brouillard ?

Crois-tu possible d’être saoul de rires, de tendresses ?

Est-il encore invincible cet ardent besoin de l’autre ?

Crois-tu que du temps qu’il nous reste, il nous reste l’ivresse ?

Que ces tentations manifestes deviennent enfin les nôtres ?

Anna – Avril 2008 ©